12 déc. 2010

BD Polar - Sélection de comics musclés et bien ficelés

Le comics américain ne produit pas que des super-héros moulés dans des préservatifs. Il créé aussi des polars hard boiled originaux. Et n'allez pas dire le contraire à Marv' (surtout si vous portez un beau manteau).
Le tournant du millénaire a été riche en découvertes mémorables : Franck Miller (Sin City, Dark Knight Returns), Brian Michael Bendis (Torso, Sam et Twitch, Powers qui va faire l'objet d'une adaptation en série) et Alan Moore (La ligue des gentlemen extraordinaire, V pour Vendetta, Watchmen, From Hell). Mais depuis, peu de nouveautés m'ont interpellées. Alors, elle est où la relève ?


Stimulé par ce cher Laurent C. et aiguillé par des libraires éclairés, j'ai creusé quelques peu les publications francophones de crime comics, tentant des nouveautés ou redonnant leur chance à des oeuvres écartées jusqu'alors. Passage en revue de ces lectures étonnantes, palpitantes, dérangeantes ou tout simplement décevantes, mais toutes destinées à des adultes consentants.



Scalped : une claque magistrale !

Âmes sensibles s'abstenir.
Que celles et ceux qui ont vibrés à la lecture de Sin City n'hésitent pas : Scalped leur procurera le même frisson. Quelques différences notables cependant. L'action ne se déroule pas dans un univers fantasmé de noir et blanc mais dans une réserve indienne pauvre et glauque. En couleur. L'extrême violence des actions, la vulgarité des dialogues et les scènes de sexe sans équivoque ne servent pas de rustines à une histoire faiblouillarde.  Au contraire, ils en renforcent le propos et le réalisme. Du dur. A côté, Tony Hillerman passe pour Agatha Christie.
La construction du scénario des deux premiers tomes est impressionnante, enchaînant les aller-retours temporels et les personnages. Très grande maîtrise narrative. La série en est au tome 7 aux "states" et la qualité semble toujours au rendez-vous. Courrez chez votre libraire.



Fables :  les bons contes font les bons polars

Comme les dieux grecs, les personnages de contes ne sont pas sans défaut ni passion. Et tu sais ce qu'elles disent parfois les princesses ? Le prince charmant, c'est pas un mec bien
Un peu déçu par le tome 11 qui ne fait pas vraiment avancer l'intrigue principale, je reste néanmoins fan de cette série dont je vous avais déjà dit un très grand bien au printemps
Pleine de créativité et de finesse, Fables est à découvrir, notamment pour ceux qui veulent savoir comment le père Noël fait pour livrer tous les cadeaux en une nuit ! 



100 bullets : polar ténébreux et addictif

Les États-Unis sont tenus par des familles mafieuses dont la force de frappe est constituée de tueurs jouissant d'une totale impunité. Mais la machine se détraque : les tueurs s'éparpillent et leur chef organise une vendetta contre les parrains.   
Débutant par une série d'histoires sombres, psychologiquement torturées, 100 bullets développe une intrigue très originale et captivante. Comme malheureusement trop souvent dans les séries, je trouve que l'histoire principale prend un peu trop son temps mais le talent des auteurs fait que l'on gobe chaque page avec avidité. 



Kick-ass : violence et décalage mais ...

Un lycéen décide de jouer au vengeur masqué. Il enfile une combinaison de plongée et part arpenter les rues. Sa première intervention est un billet direct pour l'hosto.  Buzz immédiat. 
Le scénario ne manque ni d'humour ni de surprises mais je suis un peu gêné par l'ultraviolence (têtes explosées, ...) qu'affrontent les jeunes personnages. Comme dans les films de Tarantino, cette violence est souvent décalée et contribue à faire monter la pression, donnant l'impression de quitter les conventions ou convenances du genre. Impression démentie par un dénouement classique. 




The Boys : trop c'est trop

"The boys" est une équipe de la CIA chargée de contenir les individus dotés de super-pouvoirs. De la simple intimidation au meurtre, tous les moyens sont à leur disposition. Et ils ne font pas dans la dentelle.
Garth Ennis ambitionne de surpasser son oeuvre précédente devenue référence : Preacher. Politiquement très incorrecte, cette série me semble glissante.  Paradoxe de la violence provocante utilisée pour dénoncer le système et ses dérives et qui finit par le légitimer. 
A moins que je n'ai lu les tomes trop vite ?



 
Preacher : une référence péchue et toujours dérangeante

Possédé par une entité surnaturelle, un prêtre défroqué part en croisade contre Dieu. Il est accompagné de son amante et d'un vampire copain à eux.
Déjantée, unique, hyper-créative, glauque, violente, ..., la liste des qualificatifs serait longue pour décrire de manière exhaustive cette série dont j'ai longtemps repoussé la lecture. Sous l'impulsion appuyée de Laurent C., je m'y suis finalement plongé et je ne le regrette pas. Je reconnais la qualité de cet ovni littéraire mais certaines situations dépassent mes limites. Incroyablement dérangeant.



Criminals : véritables polars noirs américains

A raison d'une histoire par tome, les auteurs développent leurs intrigues dans le monde interlope de la ville fictive de Center City.
Braquage, vengeance, vampe manipulatrice, enquêteur désabusé, ... tous les standards sont revisités avec force de noirceur et réalisme.


A recommander (chaudement) aux amateurs de polars noirs traditionnels.




Incognito : musclé et efficace 

Attiré par la couverture qui m'a parue être un clin d'oeil au Spirit d'Eisner, j'ai lu ce tome avec plaisir (rien à voir avec Eisner, en fait)
Un ancien super-vilain chimiquement bridé et  bénéficiant du programme de protection des témoins est retrouvé par ceux qu'il a trahi. Pas extraordinaire mais bien fait.
Curieusement et agréablement, cette histoire m'a rappelée les jubilatoires polars de Phillipe Thirault ayant pour "héros" Harvey Stanfield (Hémoglobine Blues, Heureux les imbéciles et Speedway - Editions du Serpent à Plume). De bons souvenirs de lectures aussi.



Ed Brubaker (dont la série Gotham Central m'avait bien plue, au passage), Jason Aaron, Bill Willingham, Garth Ennis, Brian Azzarello,   ..., la relève ne manque ni de talent ni de punch. 


Au fil des blogs, il semble qu'une autre série mérite le déplacement. N'étant pas vraiment dans la catégorie polar, même au sens large, une chronique future parlera du gothique et hallucinant Transmetropolitan de Warren Ellis.


Sylvain (spéciale dédicace à Laurent C.)

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